
J’aime Michel Tournier
pour sa fidélité aux
ingrédients traditionnels
du roman
Michel Tournier est mort. La nouvelle m’attriste tant son œuvre m’a ravi, instruit, édifié. Je l’ai découvert après son Goncourt : “Le Roi des Aulnes”, roman dont j’ai pris l’heureuse habitude d’offrir en guise de cadeau d’anniversaire à de nombreuses amies. J’ai aimé le lire, et aussi l’écouter lors de ses passages chez Pivot. Il fut avec Moravia, Mishima, Calvino, Garcia Marquez mon compagnon durant cette décennie soixante-dix, féconde en littérature. L’auteur attribuait son talent au travail, nous rappelant cette banale vérité que toute œuvre est le fruit de journées de besogne. Une affirmation bien loin des adeptes de l’imagination et du don que d’aucuns convoquent dans toute explication lorsqu’il s’agit d’une création.
J’ai aimé Michel Tournier pour sa fidélité aux ingrédients traditionnels du roman, à savoir une histoire et un style. Un choix ardemment défendu dans “Le Vent Paraclet”, et qui tranche avec cette littérature de laboratoire qui sévit actuellement. Les thèmes traités se prêtent à cette envie de conter qui passe par le mythe ou le magique bouturés à des réalités fécondes en soubresauts. La gémellité dans “Les Météores”, la dimension chrétienne dans “Les Rois mages”, le cheptel d’âmes innocentes pour des ogres ou à des fins belliqueuses dans “Le Roi des Aulnes”, le réenchantement de l’individu dans un environnement initialement hostile, les supposés handicaps de ses personnages dans “Le Coq de Bruyère”, un succulent recueil de nouvelles… La lecture de M. Tournier est vertueuse, d’où l’unanimité sur ses œuvres. Serait-ce sa venue tardive à la littérature? Ses études de philosophie qui l’ont édifié -son verbe préféré-? Notons ses débuts remarquables avec la traduction de Maria Remarque “A l’Ouest rien de nouveau” dont il relate sa rencontre avec l’auteur dans “Le Vent Paraclet”, les distinctions pour ses deux premiers écrits, respectivement le prix de l’Académie française pour “Vendredi ou les Limbes du Pacifique” et le Goncourt pour “Le Roi des Aulnes”. Une belle moisson en une décennie. A coup sûr, l’écriture était sa tutrice de résilience face à cette carrière d’enseignant qu’il voulait à tout prix embrasser et qui s’est perdue dans le maquis de l’agrégation. Belle revanche qui a ensemencé sa vie d’un chapelet de bonheurs. Son épitaphe en fait l’aveu. Le roman comme tableau pour éduquer et instruire, c’est ce qu’il a entrepris avec de grands succès le hissant au rang du plus grand romancier contemporain. Homme passionné, il l’était aussi pour la photographie à laquelle il a consacré livres et émissions, un intérêt couronné par son implication dans la création du Festival d’Arles.
Ecrire, c’est raconter une histoire, disait-il, la seule condition pour être accessible aux adultes et à la jeunesse. J’aime à rappeler cette évidence en ces temps où le lecteur se fait rare et les substituts du livre légion. M. Tournier savait capter le lecteur en réinterprétant des mythes, en exhumant de vieux personnages, de lointains événements. C’était un conteur, comme il aimait se revendiquer.
pour sa fidélité aux
ingrédients traditionnels
du roman
Michel Tournier est mort. La nouvelle m’attriste tant son œuvre m’a ravi, instruit, édifié. Je l’ai découvert après son Goncourt : “Le Roi des Aulnes”, roman dont j’ai pris l’heureuse habitude d’offrir en guise de cadeau d’anniversaire à de nombreuses amies. J’ai aimé le lire, et aussi l’écouter lors de ses passages chez Pivot. Il fut avec Moravia, Mishima, Calvino, Garcia Marquez mon compagnon durant cette décennie soixante-dix, féconde en littérature. L’auteur attribuait son talent au travail, nous rappelant cette banale vérité que toute œuvre est le fruit de journées de besogne. Une affirmation bien loin des adeptes de l’imagination et du don que d’aucuns convoquent dans toute explication lorsqu’il s’agit d’une création.
J’ai aimé Michel Tournier pour sa fidélité aux ingrédients traditionnels du roman, à savoir une histoire et un style. Un choix ardemment défendu dans “Le Vent Paraclet”, et qui tranche avec cette littérature de laboratoire qui sévit actuellement. Les thèmes traités se prêtent à cette envie de conter qui passe par le mythe ou le magique bouturés à des réalités fécondes en soubresauts. La gémellité dans “Les Météores”, la dimension chrétienne dans “Les Rois mages”, le cheptel d’âmes innocentes pour des ogres ou à des fins belliqueuses dans “Le Roi des Aulnes”, le réenchantement de l’individu dans un environnement initialement hostile, les supposés handicaps de ses personnages dans “Le Coq de Bruyère”, un succulent recueil de nouvelles… La lecture de M. Tournier est vertueuse, d’où l’unanimité sur ses œuvres. Serait-ce sa venue tardive à la littérature? Ses études de philosophie qui l’ont édifié -son verbe préféré-? Notons ses débuts remarquables avec la traduction de Maria Remarque “A l’Ouest rien de nouveau” dont il relate sa rencontre avec l’auteur dans “Le Vent Paraclet”, les distinctions pour ses deux premiers écrits, respectivement le prix de l’Académie française pour “Vendredi ou les Limbes du Pacifique” et le Goncourt pour “Le Roi des Aulnes”. Une belle moisson en une décennie. A coup sûr, l’écriture était sa tutrice de résilience face à cette carrière d’enseignant qu’il voulait à tout prix embrasser et qui s’est perdue dans le maquis de l’agrégation. Belle revanche qui a ensemencé sa vie d’un chapelet de bonheurs. Son épitaphe en fait l’aveu. Le roman comme tableau pour éduquer et instruire, c’est ce qu’il a entrepris avec de grands succès le hissant au rang du plus grand romancier contemporain. Homme passionné, il l’était aussi pour la photographie à laquelle il a consacré livres et émissions, un intérêt couronné par son implication dans la création du Festival d’Arles.
Ecrire, c’est raconter une histoire, disait-il, la seule condition pour être accessible aux adultes et à la jeunesse. J’aime à rappeler cette évidence en ces temps où le lecteur se fait rare et les substituts du livre légion. M. Tournier savait capter le lecteur en réinterprétant des mythes, en exhumant de vieux personnages, de lointains événements. C’était un conteur, comme il aimait se revendiquer.